5 idées reçues sur la protection de l’enfance

Publié le 6 septembre 2024

La protection de l’enfance est un sujet complexe, souvent entaché d’idées reçues qui influencent nos jugements. Que ce soit à travers des stéréotypes ou un manque d’information, ces idées fausses nuisent autant aux enfants qu’aux familles concernées.

Dans cet article, nous déconstruisons cinq idées reçues majeures, afin de mieux comprendre les réalités de ce système essentiel.

Idée reçue n°1 : “Le placement c’est comme une punition”

Contrairement à ce que certain·es imaginent, le placement n’est pas une sentence destinée à punir ni l’enfant, ni les parents. Il s’agit d’une mesure de protection lorsque l’environnement familial est jugé dangereux pour l’enfant. Le placement vise à garantir la sécurité et le bien-être de l’enfant.

Assimiler le placement à une punition ignore son objectif principal : offrir un environnement stable à l’enfant. Nombreux sont ceux et celles qui perçoivent le placement comme un refuge, un endroit sécurisé où ils peuvent recevoir de l’attention et les soins dont ils·elles ont besoin.

Loin d’être définitif, le placement est souvent une étape transitoire. Les professionnel·les, qu’ils soient éducateurs, éducatrices ou assistant·es sociaux, travaillent en lien avec les familles pour que l’enfant puisse retrouver un cadre stable, que ce soit dans sa famille ou dans un autre environnement.

Idée reçue n°2 : “Les enfants placés sont des délinquants”

Cette idée reçue découle d’une méconnaissance des raisons variées qui mènent au placement. Trop souvent, des enfants sont étiquetés comme “problématiques” simplement parce qu’ils ont été pris en charge par les services sociaux. Or, ce n’est pas le comportement de l’enfant qui motive cette décision, mais la nécessité de le protéger d’un environnement familial pouvant nuire à son bien-être, sa santé ou son développement.

En réalité, la majorité des enfants placé·es sont victimes de maltraitance, de négligence ou de situations familiales précaires. Ces enfants ont besoin d’être compris et soutenu, pas d’être catalogués comme des délinquant·es. Le placement est un espace de sécurité où ils peuvent se (re)construire, loin des préjugés.

Il est essentiel de rappeler que le placement n’est pas conditionné par le comportement de l’enfant. De plus, vivre une période de placement ne prédestine pas à la délinquance.

Idée reçue n°3 : “Les enfants issus de la protection de l’enfance n’ont aucune chance de s’en sortir”

On entend souvent que les enfants placés sont voués à un avenir difficile. Mais est-ce vraiment vrai ?

De nombreux jeunes grandissent et s’épanouissent après un passage par l’aide sociale à l’enfance.

Pour certains d’entre eux, la protection de l’enfance a été un tremplin pour s’épanouir dans un environnement stable et sécurisant, loin des difficultés qu’ils ont connues auparavant.

Ils développent des valeurs solides, gagnent en autonomie, s’ouvrent à de nouvelles cultures, apprennent à s’assumer et à ne pas se sous-estimer.

Certes, leur parcours n’est pas toujours facile, mais c’est leur détermination qui leur permet de surmonter les obstacles et de bâtir un bel avenir. 

Célia, ayant fait l’objet d’une mesure de protection de l’enfance et membre du Comité “Espoir pour la protection de l’enfance” a d’ailleurs partagé son témoignage à la CNAPE pour contrer ce préjugé : 

“Le placement m’a été bénéfique dans le travail de la confiance en moi, me positionner, m’assumer, comprendre mes valeurs et ne pas sous-estimer ce que je vaux. Je pense sincèrement que sans ce placement, je serais au même point mort dans ma vie […] et je n’aurais pas eu le même recul que celui que j’ai actuellement, qui me permet de mieux gérer mes émotions, me détacher des problèmes qui ne me concernent plus et à mieux comprendre le comportement de chacun avant d’émettre un mauvais jugement envers la personne.”

boy and girl surrounded by plants

Idée reçue n°4 : “Une fois l’enfant placé, les parents n’ont plus leur mot à dire”

Les parents conservent toujours un rôle important dans la vie de leur enfant placé.

Le placement ne suspend pas l’autorité parentale. Cela signifie que les parents continuent d’avoir des droits et des devoirs vis-à-vis de leur enfant, tel que le droit de visite et d’hébergement, le droit de consentir à certains actes médicaux …

Les décisions concernant leur enfant ne se font pas sans eux. Ils sont tenus informés des projets éducatifs, par exemple, et peuvent participer à des réunions de suivi avec les professionnel·les de la protection de l’enfance.

Si cela est bénéfique pour l’enfant, la structure d’accueil met tout en œuvre pour maintenir le lien avec le(s) parent(s), par exemple grâce à des visites encadrées.

Il faut aussi souligner que le placement n’est pas une solution définitive. L’objectif est toujours de travailler vers une réunification familiale sécurisée, lorsque cela est possible.

Toutefois, il est important de noter que chaque situation est unique. Le retour dans la famille n’est pas toujours envisageable si la sécurité et le bien-être de l’enfant sont menacés (risques de violences, négligences graves, troubles psychiatriques chez un parent…).

Idée reçue n°5 : “Un enfant maltraité est forcément issu d’une famille défavorisée”

En 2013, Céline Raphaël publie un livre “La démesure”. 

Elle y raconte son enfance, pendant laquelle elle était battue quotidiennement par son père… directeur d’usine. Ce livre elle l’a écrit pour prouver que la maltraitance n’est pas marginal et ne concerne pas uniquement les classes défavorisées. 

Si la pauvreté peut être un facteur de risque, elle n’est ni la cause unique, ni la cause majoritaire de la maltraitance. 

Qu’ils viennent de milieux aisés ou défavorisés, de toutes les religions et de tous les types de familles, les enfants subissent des violences dans des contextes bien plus variés qu’on ne le pense.

Cette idée reçue est aussi alimentée par les statistiques sur la maltraitance infantile qui doivent être interpréter avec prudence. 

Comme le souligne Anne TURSZ, pédiatre et épidémiologiste à l’Inserm :

Si les familles défavorisées sont souvent sur-représentées dans les statistiques, c’est surtout parce qu’elles sont plus l’objet de l’intérêt des services sociaux

Il est nécessaire de briser cette idée reçue pour plusieurs raisons :

  1. Elle culpabilise injustement les familles défavorisées
  2. Elle alimente la stigmatisation des enfants maltraités
  3. Elle masque la réalité de la maltraitance au sein des autres familles

Restons vigilant·es, la maltraitance peut être partout, même dans les environnements qui semblent les plus sûrs.

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